ChatGPT « peut entraîner une baisse des capacités cognitives jusqu’à vous rendre plus bête », alerte un sociologue

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Depuis son arrivée il y a trois ans, ChatGPT s’est glissé dans nos vies, privée et professionnelle, entre promesses et inquiétudes. Le sociologue Dominique Boullier s’inquiète des conséquences d’un usage excessif des robots conversationnels.

Trois ans après sa création, ChatGPT est utilisé quotidiennement par plus de 800 millions de personnes dans le monde, pour des raisons personnelles et/ou professionnelles.

Dominique Boullier, sociologue spécialiste des technologies cognitives et professeur à Sciences Po et auteur de « Déshumanités numériques » (Éd. Armand Colin), pointe plusieurs risques liés à l’utilisation massive de cette intelligence artificielle développée par OpenAI.

Pourquoi autant de gens tombent-ils accros à des outils comme ChatGPT dans leur vie personnelle ?

DOMINIQUE BOULLIER. L’intérêt principal de ChatGPT est d’être un outil conversationnel accessible à tous. Nous ne sommes plus obligés d’être informaticiens pour parler à la machine, comme lorsqu’on est passé de la commande de code au texte. OpenAI pousse aussi très loin la connexion affective, ChatGPT habitue les gens car il peut répondre à tout. Il n’en a jamais marre, il répond 24 heures sur 24 heures, il finit par être quelqu’un que l’on personnalise, comme un compagnon véritable, etc. C’est très puissant.

«Déshumanités numériques», Dominique Boullier, Éditions Armand Colin, 224 pages, 16,90 euros.

«Déshumanités numériques», Dominique Boullier, Éditions Armand Colin, 224 pages, 16,90 euros.

Quels en sont les risques ?

Il y en a deux principaux. Le premier est lié au type de réponses qu’il fournit. Celles-ci sont systématiquement empathiques, il vous soutient, vous encourage, vous flatte, etc. Or, dans une relation, il y a parfois de la résistance ! Personne ne vous dit que vous avez toujours raison, sinon vous allez vous en méfier. Mais avec ChatGPT, personne ne se méfie. Et personne ne va lui demander d’être volontairement méchant ou agressif.

Le deuxième risque est lié à la perte de compétences et d’appétences. Au bout d’un moment, vous n’aurez plus envie de prendre le temps de chercher à comprendre car ChatGPT fait tout le travail à votre place, vous disant même de quoi avoir envie. Vous ne serez plus en mesure de construire vos propres désirs ni de vous demander Mais qu’est-ce que je veux vraiment ? ChatGPT peut aussi entraîner, à force d’être utilisé, une baisse des capacités cognitives jusqu’à vous rendre plus bête. De même que si vous n’utilisez que le GPS en permanence, vous perdez le sens de l’orientation et vous ne savez plus vous repérer par rapport au soleil.

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Quels garde-fous faut-il s’imposer ?

Pour éviter de perdre trop de temps et de capacités, il faut se fixer une limite, comme d’y passer maximum une heure par jour ou de lui soumettre au maximum 3 ou 4 requêtes par jour. Mais ces régulations devraient être imposées par OpenAI elle-même, et pas seulement dans la version gratuite. Le gouvernement doit jouer son rôle et intervenir sur ce type de sociétés, pour des raisons de santé mentale. On en connaît les conséquences : dans deux ou trois ans, on va pleurer car des gens se comporteront de façon bizarre…

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